Le nouveau Vérificateur Général prête serment ce lundi devant la Cour suprême. Vendredi, la passation de service « aura été très courtoise » entre Amadou Ousmane Touré et Sidi Sosso Diarra le Vérificateur général sortant qui vient de finir son mandat non renouvelable de sept ans. Rentrant d’Abidjan où il était l’ambassadeur du Mali, Touré, magistrat de premier grade, s’est illustré au poste de procureur de la Commune III, ce qui faisait de lui le patron des juges chargés de la répression de la délinquance financière.
Il était le premier des trois candidats présélectionnés sur une vingtaine qu’Abdramane Touré, président de la Commission de dépouillement, soumettra au président de la République. Le 31 mars, le décret nommant le deuxième Vérificateur Général de l’histoire du Mali est rendu public.
Quelques heures auparavant, Sidi Sosso Diarra remettait le sixième et dernier rapport de son mandat au Chef de l’Etat dans une ambiance dont Amadou Ousmane Touré ne manquera pas de tirer les leçons. Expert comptable formé dans les meilleures écoles de France, Diarra aura eu un mandat plutôt mouvementé.
La raison ? L’opinion le trouvait « brillant mais peu éduqué sur les réalités de l’administration et de la société maliennes -il a fait sa carrière plutôt en France, au Rwanda, en Côte d’Ivoire et au Sénégal avec des institutions prestigieuses comme Ernst and Young et la Bceao. Il lui sera même reproché en haut lieu de « privilégier le spectacle ». Sans doute, une allusion à la médiatisation que le pouvoir jugeait «tonitruante » que Sidi Sosso faisait de son travail.
Ce à quoi, celui-ci répondait sans désemparer que c’est la loi qui l’obligeait à rendre public son rapport. « Une obligation de résultat dont il m’appartenait de déterminer les moyens », se défendait t-il, lui qui croit avoir décelé un manque à gagner de 388 milliards de Cfa sur l’ensemble des contrôles effectués durant son mandat.
Mandat mouvementé
L’équivalent de l’aide décennale de la France au Mali! Manque à gagner ? Le terme agace le gouvernement qui tente de le récuser publiquement en janvier dernier. Peine perdue : Sidi Sosso Diarra le reconduit, deux mois plus tard, dans son rapport final. L’homme n’en était pas à sa première rebuffade.
Quand les entités vérifiées dénoncent « le manque de contradictoire », le « contradictoire » désignant le processus par lequel la loi oblige le Vérificateur à examiner les explications du vérifié, l’expert-comptable s’indigne « Faux, nous écoutons et examinons mais nous ne sommes pas toujours convaincus.
Et puis, il faut distinguer entre la bonne foi et le dilatoire, sinon aucun rapport ne sera bouclé ». Enfin, la question des suites réservées aux rapports du Vérificateur général a souvent crée la controverse. Moins depuis trois ans que Primature publie un rapport de suivi sur le sujet.
La perception reste, cependant, répandue que l’impunité a encore de beaux jours devant elle. C’est dans ce climat d’incrédulité au sein du public que le nouveau Vérificateur Général s’installe. Mais c’est l’affaire de l’Etat. Autre question concernant l’Etat mais pas que lui : le statut du Bureau du Vérificateur Général dans la perspective de l’arrivée de la Cour des Comptes. Cette institution est exigée par le Traité de l’Uemoa. Et la formule du compromis n’a jamais été débattue, du moins publiquement.
A savoir permettre au Bureau du Vérificateur d’exercer le contrôle juridictionnel et ajouter la certification des comptes à ses trois missions actuelles que sont : l’audit de régularité, l’audit de performance, les préconisations. Pour ce qui concerne Amadou Ousmane Touré sa force, contrairement à son prédécesseur c’est d’être un produit de l’administration et de la société maliennes. Mais hélas c’est aussi sa faiblesse. C’est tout dire. Et son contraire.
Adam Thiam